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Faites les taire

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3 juin 2008

Un sac plastifié exhibé fièrement.

Un sac plastifié exhibé fièrement à la pliure de son coude. Ce même sac, offert à toutes les clientes d'une célèbre marque de cosmétiques bon marché, pour un produit de beauté acheté avant la date figurant au dos de ce coupon. Vêtue sobrement de noir, des pieds à la tête, elle attend, plantée devant cette boutique d'instruments de musique. Même les guitares alignées dans la vitrine paraissent plus vivante qu'elle. Jusqu'au moment où un discret mouvement est esquissé. Une montre reluquée, et une situation se dessine plus nettement. Elle attend. En pleine ville, immobile. La circulation automobile se débloque et le bus me conduit loin du suspense. La fin de l'histoire sera connue par d'autres passants.

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31 mai 2008

Et ses doigts longs et fins.

Et ses doigts longs et fins, prêts à porter l'alliance maritale, qui se baladent sur son corps à lui, musclé encore chaud et transpirant, ne sait-il pas que son index et son majeur, à elle, se trouvaient enfoncés dans sa gorge, quelques heures auparavant, quand accoudée à la cuvette, elle extirpait de ses entrailles, toute cette sale bouffe qui lui pourrit l'estomac. Il la contemple et lui susurre délicatement que vraiment, son corps atteint la perfection. Étouffée par des draps disloqués, elle explose de rage, tant cette hypocrisie sonne à ses oreilles comme un coup final. Mais elle choisit de se taire. De se murer dans le silence, qu'elle a toujours connu. Ce n'est facile pour personne, lui signifiait sa mère, lorsqu'elle n'était encore qu'une enfant, avec de chères bouclettes blondes qui ont ravies plus d'une grande personne. Des années après, dans ce lit, confinée et serrée contre cet homme, avec qui elle espère naïvement vieillir, elle comprend enfin. Elle comprend paradoxalement que ce n'est facile pour personne. Et refuse de tourner l'adage au positif, c'est facile pour tout le monde. Absurde et dérisoire. Ses paupières la plongent dans le noir complet. À son réveil, seul le vide l'entoure de sa présence glaciale. Le vide. Et quelques viennoiseries, une fleur et un post-it sur lequel est inscrit : Le jour pousse la nuit, et la nuit sombre pousse le jour qui luit d'une obscure ombre. Elle rira de Ronsard et le croissant mâchouillé et déglutit, sera emporté dans le tourbillon de la chasse d'eau...


31 mai 2008

Je pose mes bagages ici.

Ils ne sont pas très épais, et pourtant, ils pèsent si lourds. À bout de bras, je les tiens jusqu'au dernier instant. Jusqu'au dernier instant, je les aurais tenus, leurs poignées solidement ancrées dans mes mains jusqu'alors repliées. Mais il est temps de les laisser. Au bord d'une route, en plein milieu d'un aéroport, les jeter dans une poubelle. Les oublier. Ne jamais tenter de retrouver la trace, si infime, qu'ils auront laissé sur cette maudite planète.

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